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L'île aux langues

 

 

Dans le cadre des actions du Programme AlphaB, nous partons à la rencontre d'associations qui rejoignent nos thématiques (alphabétisation, lutte contre l'illettrisme, enseignement du français, solidarité...)
Ce mois-ci, nous vous présentons l'association L'île aux langues
 
 

C’est par Alice et Virginie Minh que je suis accueilli dans les locaux de l’association l’Ile aux Langues, créée en 2011. La première est chargée de projets, la seconde est co-fondatrice et responsable pédagogique.

Si le local est assez petit, l’association, elle, est dynamique et très active. Il y a une base d’environ 3-4 salariés à temps plein auxquels s'ajoutent des CDD réguliers, des prestataires et une dizaine de bénévoles par an. L’association se divise en trois champs d’action : les ateliers de français ; l’ingénierie pédagogique et la formation de formateurs.

 

 

Les cours de français

L’année dernière (2015-2016), il y a eu entre 260 et 300 apprenants, dont 218 inscrits au test d’évaluation (chaque nouvel apprenant passe un petit « test » de 30 minutes pour déterminer son niveau). L’association ne dispose que d’une salle pour dispenser les différents cours. Les ateliers sont animés soit par des formateurs professionnels salariés, soit par des bénévoles, en fonction des besoins et des moyens octroyés à chacun des projets. Toutefois pour les bénévoles, il y un parti pris : celui de la professionnalisation. Ces derniers font des études de FLE (français langue étrangère) et sont encadrés par la responsable pédagogique. Ils donnent des cours de 2h par semaine au sein de l’association. Cela leur permet de se former et d’acquérir de l’expérience. Ces ateliers sont gratuits et ne font l'objet d'aucune subvention, ce qui signifie que ce sont des ateliers qui permettent d’accueillir un large public sans distinction de statut.

En revanche, les cours financés par des subventions sont assurés par des professionnels qui sont bénévoles et des salariés non professionnels, ce qui n’empêche pas les bénévoles en formation d’y assister et de venir en appui.

Les cours sont divisés en plusieurs dispositifs, avec des objectifs différents.

  • L’atelier de français général. Un atelier accueillant surtout des demandeurs d’asile en FLE, avec l’objectif d’atteindre le niveau A1 (les niveaux). Cet atelier est composé de 4 groupes et dispense 10h de cours par semaine (2h par jour).

 

  • Le dispositif relais vers l’emploi. Un dispositif qui s’adresse aux demandeurs d’emploi. Ici le français est à visée professionnelle et les apprenants sont envoyés par l’Espace proximité emploi de la Goutte d’Or, Pôle Emploi, la mission locale ou le PLIE. Trois groupes bénéficient de ce dispositif : des personnes en alphabétisation, des personnes en FLE débutant à l’oral et des personnes en FLE avec pour objectif le niveau B2.Une des particularités de ce dispositif, qui a accueilli 55 personnes en 2016,  ce sont les entrées et sorties permanentes des apprenants, dues à la recherche d’un emploi.

 

L’association dispense également des cours de FLE général payants pour les apprenants, des ateliers de phonétique (ateliers pour travailler la prononciation des mots.

Virginie Minh m’explique aussi qu'il y a encore quelques temps, l'association organisait des cours avec les écoles du quartier. Dans les écoles, des cours de français étaient proposés aux parents, avec comme objectif de faciliter la compréhension du système éducatif français, prenant appui sur des documents authentiques. Malheureusement, faute de participants, ces ateliers n’ont pas continué.

En revanche, des cours de français numérique à destination des parents résidant dans les quartiers de la Goutte d’Or et de la Chapelle, débutent en octobre et répondront aux besoins des apprenants sur les thématiques parentalité, emploi, santé, culture…

 

 

L’ingénierie pédagogique

L’île aux Langues c’est aussi de l’ingénierie pédagogique, c'est-à-dire la création et la diffusion de supports pédagogiques et la didactisation de supports authentiques. Ces supports sont à destination des associations, des bénévoles, mais également des professionnels. Ils traitent de la santé ou de la culture et permettent de faciliter les interventions et les sensibilisations auprès de personnes maitrisant peu la langue française.

·         J’apprends le français au musée Carnavalet

·         Livret de l’apprenant de la langue française : parcours découverte de la BnF

·         La mallette santé

·         J'apprends le français au musée Cernuschi

 

 

La formation de formateurs

Enfin, le troisième volet d’action de l’association est la formation de formateurs. Celle-ci s’organise à la demande de structures extérieures : soit dans des centres sociaux ou autres structures sociales, soit dans des associations ou Tous Bénévoles. Il s’agit de formations de méthodologie et techniques d’animation.

·         Compte rendu de formation : méthodologie d’enseignement du français aux migrants. Formation organisé par l’association Tous Bénévoles.

 

Cours de Français multiples, ingénierie pédagogique, formation de formateurs, en définitive, il s’agit d’une association très active sous ces divers aspects. De plus, elle est très ancrée dans le tissu associatif de la Goutte d’or, ce qui lui permet d’organiser des visites, des sorties avec les apprenants, mais également des partenariats avec les associations/entreprises/structures du quartier.

 

 

 

 

Une séance à l’Ile aux Langues

Lors de mon entretien avec Alice et Virginie Minh, Piia, formatrice salariée, nous a rejoints. C’est par la description d’un atelier de français par Piia que se termine la présentation de l’association :

« Il y a toujours des consignes, on demande où ils en sont. On utilise tout ce qu’il y a à notre disposition dans la salle, toujours selon les consignes et objectifs de la séance.

On utilise beaucoup les gestes pour parler et se faire comprendre, également pour bien « mettre en forme » les voyelles par exemple. Les difficultés viennent surtout de la langue et de l’alphabet d’origine (l’alphabet arabe n’a pas autant de voyelles que le nôtre par exemple).

Les cours sont co-construits avec les apprenants, ces derniers sont actifs. Je pose la question à celui qui est sur le point de savoir, pas à celui qui sait, celui qui sait aide à ce moment-là. Il n'y a pas d’erreurs en soi, du moins, l’erreur n’est pas négative. On prend en compte les besoins, les difficultés, sans juger, on adapte le programme, tout le monde comprend qu’on est là pour apprendre.

Parfois, cela peut être plus difficile, dues aux origines des apprenants. Par exemple, il y a eu cette apprenante venant d’un pays en guerre civile qui suit nos cours depuis 6 mois. Deux autres apprenants du même pays sont arrivés. Or ces deux derniers faisaient partis du camp opposé. La femme a eu du mal au début et ne voulait plus venir aux cours. Cependant, les deux nouveaux arrivants ont été très bienveillants, en demandant de ses nouvelles par exemple, et la femme est revenue. Elle a repris confiance en remarquant qu’elle avait plus d’expérience qu’eux dans la méthodologie de nos séances.

Aussi, pour certains sujets difficiles, on utilise un objet ou une peluche pour dépersonnaliser.

Toutes les situations « réelles » sont utilisées pour les cours : une personne entre et dit bonjour, cela fait partie des cours. Si c’est un cours de français à visée professionnelle et qu’il faut faire des photocopies, la personne qui ne sait pas le faire va le faire, et toutes ses actions seront décrites au tableau. Idem pour les sorties : si les apprenants vont au cirque, ils travaillent sur le trajet, ils travaillent la discussion orale après le spectacle autour d’un verre, etc. »

 

Jean-Pierre Coudouy pour le Programme AlphaB

 

Pour contacter L'île aux Langues

contact[a]lial.fr

09 84 10 60 66